Equilibre et allures naturelles
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Un des buts du dressage est d’arriver à obtenir sous la selle les allures et l'équilibre naturels du cheval.
Voilà plusieurs fois que je m’entends dire ou que je lis ce genre de commentaire :
« Je ne peux obtenir mieux car en liberté, c’est comme ça qu’il se déplace. »
Parfois suivi de : « Il ne me reste alors qu’à tenter d’améliorer la qualité de l’allure (ou de son équilibre,…) ».
J’en viens alors à me demander si le travail monté améliore vraiment la qualité des allures naturelles ou est-ce les allures naturelles qui s’améliorent au files des années et qui se répercutent sur le travail monté ? Pareil pour l’équilibre ?
Est-ce au pré, en galopant librement qu’il a appris à s’équilibrer dans ses tournants ou est-ce parce que le cavalier lui a appris à s’équilibrer sous la selle qu’il se met alors à galoper dans un meilleur équilibre dans son pré ?
Est-ce que le fait d’avoir modifié « artificiellement » la musculature du cheval par le travail sous la selle lui a permis de mieux se gérer en liberté ?
Message édité par: sweetmusic, à: 2009/04/27 20:06
Laurence a écrit:
Un des buts du dressage est d’arriver à obtenir sous la selle les allures et l'équilibre naturels du cheval.
Je ne suis pas entièrement d'accord avec cela. Un cheval en liberté fait le moins d'efforts possibles pour aller d'un point à un autre. Il marche d'une touffe d'herbe à l'autre avec le nez au raz du sol, trotte la tête en l'air et exécute ses changements de direction au galop en se couchant avec la tête à l'extérieur de la courbe. Il n'en est autrement qu'à de rares occasions, notamment lors des tentatives d'intimidation de ses congénères. Ce n'est pas ce que l'on recherche en dressant un cheval.
Selon moi, donner au cheval une musculature et une orientation adéquates pour supporter le poids d'un cavalier sans induire de pathologie devrait être la première chose à rechercher. Sans cela, rien n'est envisageable.
D'autre part, Il me semble évident que tous les chevaux ne naissent pas égaux et que le travail ne peut qu'améliorer leurs dispositions naturelles. C'est à ce problème que nous sommes confrontés lors de l'achat d'un jeune cheval qui n'a pas encore été travaillé.
Dans votre premier paragraphe, vous décrivez très bien le changement de direction d'un cheval qui se défoule, qui joue ou qui fuit,...
Mais qu'en est-il lorsqu'il se pavane ?
J'aurais du écrire : Un des buts du dressage est d’arriver à obtenir sous la selle les allures et l'équilibre naturels du cheval qui se pavane.
Certes on ne voit pas un cheval piaffé ou passagé devant sa touffe d'herbe préférée, mais bien devant un congénère qu'il trouve soit attirant, soit un peu trop entreprenant. Tout comme il peut effectuer une très jolie demi-piroutte au galop, rassemblée, harmonieuse, et donc bien sur l'arrière main, lorsqu'il entend au loin un bruit qui lui est agréable. Bien entendu, il ne la passera pas en 3 ou 4 foulées comme le veux le protocole de dressage moderne mais en une seule (voir deux).
Toujours dans le but de "pavaner".
Ce sont ses allures et cet équilibre là que nous recherchons je pense.
Quant à l'amélioration des allures naturelles, ne devrions-nous pas nous contenter de ce que le cheval peut nous offrir, avec sa propre morphologie ou pouvons-nous tenter d'obtenir de lui des allures que nous jugeons meilleures ? N'allons-nous pas alors vers des allures artificielles ?
Laurence écrit:
Quant à l'amélioration des allures naturelles, ne devrions-nous pas nous contenter de ce que le cheval peut nous offrir, avec sa propre morphologie ou pouvons-nous tenter d'obtenir de lui des allures que nous jugeons meilleures ? N'allons-nous pas alors vers des allures artificielles ?
Toute la question est bien là!
Pour tout jeune cheval, une gymnastique bien faite, partie essentielle du dressage, aboutira assez sûrement à améliorer les allures, sans pour autant les pervertir; de même qu'une gymnastique bien faite permettra à l'enfant de mieux se déplacer; les moins doués au départ seront d'ailleurs ceux qui en profiteront le plus. Voilà pour l'amélioration basique, inhérente à toute idée de dressage, le niveau 1.
Ensuite peut venir le plus qui fera du cheval un danseur: c'est une discipline plus poussée que celle de la base, et axée en direction d'une expression artistique, comme chez l'humain la formation du petit rat est plus exigeante et expressive. Ici nous sommes toujours dans le respect de la nature : la danseuse étoile ne ressemble pas à une athlète de l'ancienne URSS ou RDA... C'est le niveau 2, le septième ciel (excusez-moi, je compte en quasi-binaire ce soir).
Cette deuxième forme de perfectionnement des allures dérive souvent vers des abus, des perversions ou du charlatanisme de la part de ceux qui ne se préoccupent que des résultats en concours, de l'épate et autres horreurs et qui oublient allègrement la nature de leur cheval (à supposer qu'ils soient capables de la connaître): niveau 0.
Comme d'habitude en équitation, la ligne de séparation est étroite, presque invisible et facile à franchir. À nous de veiller au grain!
Amitiés,
Jean M
Merci Jean !
Le cheval toujours en liberté, jamais monté, est-il capable, en viellissant, de se sublimer de lui-même ?
Ne voit-on jamais un "vulgaires cheval de pature, au physique ingrat, épris d'une envie d'évasion passager à la barrière de son prés comme un cheval de haute école, sans rien à envier aux chevaux de concours ?
Je pense à ce poney grassouillet que je vois parfois lorsque je vais chez une amie, ensellé par les années de grosseur. L'autre jour, on venait de lui enlever son compagnon de pature pour l'emmener je ne sais où. Il piaffait de rage devant la cloture. Le genre de piaffé que beaucoup d'entre-nous rêverait d'obtenir un jour avec un vulgaire cheval.
Hors il ne s'est pas entrainné pour le faire. C'est l'adrénaline de la colère et de la peur qui l'a rendu comme ça.
Laurence écrit:
Le genre de piaffé que beaucoup d'entre-nous rêverait d'obtenir un jour avec un vulgaire cheval.
Hors il ne s'est pas entrainné pour le faire. C'est l'adrénaline de la colère et de la peur qui l'a rendu comme ça.
C'est justement l'équilibre transcendant qu'évoquait Marie Poppins et dont parle Dominique Ollivier (est-il l'inventeur de la formule ?) dans Équitation : l'équilibre du cheval monté, livre que je suis justement en train de lire et que je trouve intéressant bien que d'une qualité littéraire malheureusement assez médiocre qui le rend parfois un peu indigeste.
Bonjour,
Laurence a écrit : « Est-ce au pré, en galopant librement qu’il a appris à s’équilibrer dans ses tournants ou est-ce parce que le cavalier lui a appris à s’équilibrer sous la selle qu’il se met alors à galoper dans un meilleur équilibre dans son pré ? » Intéressant.
L’effet inverse se voit par contre.
Celui du cheval qui n’a pour exercice que d’être monté, et qui se déplace maladroitement lors de sa mise en liberté…
La posture (ou les postures) imposée au cheval ne tient pas compte de ses allures naturelles exprimées sans contrainte et qui sont tout simplement le pas, le trot et le galop (elles sont comprises dedans ! inutile d’aller dans un pré pour donner un sens au mot « naturel »).
J’ai connu des cavaliers qui ne laissaient pas les rênes s’allonger, soit par crainte de ne pouvoir retrouver « la posture », soit s’imaginant que le cheval pourrait perdre ses acquis avec des rênes longues… (Hé, là il est dans le vide !)
Donc, j’imagine que d’abord il ne faudrait pas par erreur modifier les allures de base du cheval. Puis avant d’imaginer « corriger » ses équilibres, essayer de ne pas le mettre en situation de se déséquilibrer…
Le livre de Jean Saint-Fort Paillard est très utile pour un éveil dans ce sens. (1975, préfacé par d’Orgeix. Mauvaise reliure : presque toutes les feuilles de mon livre sont devenues volantes…)
Amicalement.
D'après Ollivier, il y a deux types d'équilibre chez le cheval :
- le cheval au pré qui se traîne, encolure lâche, dos lâche, qui se tire sur les épaules (je caricature) et
- le cheval "fier" en liberté qui bondit, vole, piaffe, se rassemble, bondit...
Pour lui, toute la question du cavalier est d'obtenir l'équilibre n°2 sans avoir sous la selle l'équilibre n°1, ce qui demande beaucoup de temps (pour muscler et préparer) et de travail.
Pour Pradier, il s'agit de retrouver la locomotion naturelle du cheval (= la plus confortable et la moins fatigante pour le cheval, ce qui dépend de chaque cheval) avant d'espérer, si on est un cavalier hors paire, l'améliorer ou la sublimer. Là aussi, beaucoup de temps et de travail sont nécessaires.
Sinon, il est sûr qu'il faut faire avec les talents du cheval et se contenter de ce qu'un cheval peu gâté peut offrir, de même, "réussir" à équilibrer n'est pas si évident. Je pense que le cheval a au départ SES allures et SON équilibre, mais que sous le cavalier, il faut en créer un nouveau qui, lui, va dépendre de nombreux facteurs et notamment de la décontraction que le cheval va acquérir (surtout s'il n'est pas exceptionnel) sous le cavalier. Maintenant, c'est sûr qu'un travail bien mené va mettre à disposition du cheval en liberté des moyens dont il ne disposait pas avant (exemple : des muscles plus entraînés).
Bref, question intéressante, vivement d'autres avis!